Sandrine Destangs : de l’assemblage des raisins au brassage des compétences
De Maître de Chai et Responsable d’Exploitation viticole à Éducatrice Spécialisée Chargée d’insertion et Responsable qualité au sein de l’ESAT Magdeleine de Vimont, un parcours atypique qui mérite une petite explication !
Quand et comment êtes-vous arrivée à l’Institut Don Bosco ?
« En 2010, mais à l’époque l’ESAT appartenait encore à l’association Les Ateliers Saint Joseph !
Je travaillais dans une propriété viticole à Sainte-Foy-la-Grande, elle a été vendue et je ne souhaitais plus rester. J’ai donc commencé à chercher un emploi ailleurs et je suis tombée sur une annonce dont les missions consistaient à faire les vinifications et créer un atelier « chai » avec des personnes en situation de handicap. Je commençais à avoir fait le tour des missions et des fonctions dans le domaine viticole, mais là, il y avait quelque chose en plus, quelque chose que je n’avais jamais fait. Un nouveau challenge s’ouvrait à moi ! » Elle a été choisie et monte ses premiers ateliers en tant que monitrice-éducatrice, sans diplôme. « Au début, ça n’a pas été facile car j’étais très autonome dans mes postes précédents. J’ai découvert le milieu médico-social et un fonctionnement très différent de celui auquel j’étais habituée ! ».
Vous étiez diplômée en œnologie mais vous n’étiez donc pas formée en tant qu’éducatrice ?
« J’avais un DNO (Diplôme National d’œnologue, BAC +4 à l’époque), qui est un diplôme plutôt technique. Lorsque mes missions sont devenues plus transversales, j’ai validé mon parcours avec un DEES (Diplôme d’Etat d’Educateur Spécialisé) en VAE.»
Hors parcours professionnel, elle s’est intéressée à l’autisme dès 2005. Elle a fait partie d’une association de familles puis a passé son DIU (Diplôme Inter-Universitaire) autisme à la fac de médecine, dont le mémoire fut salué.
Comment en êtes-vous arrivé au poste de monitrice-éducatrice à celui que vous occupez actuellement ?
« Dans le cadre du DIU, j’ai rédigé mon mémoire « Adultes TSA en milieu de travail protégé : représentations et réalités » en m’inspirant d’un cas complexe que nous avions à l’ESAT : un jeune mal diagnostiqué et les souffrances engendrées pour lui et pour l’équipe. C’était en 2016 et l’ESAT Magdeleine de Vimont venait de fusionner avec l’Institut Don Bosco.
Michel Labardin, notre nouveau Directeur Général, s’est montré intéressé par mon travail et m’a offert la possibilité de développer certaines idées notamment par le biais d’un partenariat entre l’ESAT et l’IME Saute-Mouton. En ouvrant progressivement l’ESAT à l’accueil d’un autre public, l’idée était de faire bouger les lignes et de décoller les étiquettes.
D’autre part, j’étais un peu arrivée au bout de mon travail en production et je souhaitais m’investir dans ces nouvelles missions. »
Quelles ont été vos premières missions ?
« Notre nouveau directeur, David Boidron, m’a d’abord confié le pilotage de la réécriture du projet d’établissement. Puis mon poste s’est créé sur-mesure en fonction de mes aspirations et des besoins de l’ESAT : l’insertion en milieu ordinaire des personnes accueillies, la coordination des partenariats autisme et la démarche qualité. Mes missions « qualité » se sont articulées autour du projet d’établissement, de l’amélioration continue, des nouvelles modalités d’évaluation interne et externe (logiciel Arsene), de l’organisation des CVS… par exemple, j’essaie de faire vivre la démarche qualité auprès des personnes accompagnées au moyen de questionnaires pour recenser leurs idées. Nous avons beaucoup d’idées mais pas assez de fonds pour toutes les mettre en œuvre malheureusement. »
Avez-vous un moment ou un souvenir très marquant ?
« Des bons souvenirs, j’en ai tout le temps ici ! On est une super équipe, les travailleurs, l’encadrement, la hiérarchie, … La relation humaine est vraiment au cœur des préoccupations de chacun d’entre nous. L’idée de « faire équipe » est importante, on essaie de beaucoup communiquer. Il y a une réelle unité. Notre directeur, David Boidron nous encourage et nous met face à nos responsabilités, car il délègue beaucoup. Nous sommes responsables de ce que l’on va demander. Si on ne veut pas quelque chose, il faut proposer une autre solution et aller jusqu’au bout de la démarche. Donc c’est très stimulant, on se sent tous acteurs ! »
En tant que chargée d’insertion, vous jouez un rôle majeur dans la mise à disposition des travailleurs en situation de handicap, en quoi cela consiste ?
« La mise à disposition, c’est quand une personne accompagnée souhaite travailler dans le milieu ordinaire, dans une entreprise prête à l’accueillir. L’avantage pour l’entreprise, c’est la souplesse de ce dispositif et la possibilité de s’acquitter de son obligation d’emploi de travailleur handicapé (OETH). Cependant, peu de nos travailleurs partent à 100% dans le monde ordinaire car les entreprises privilégient encore les personnes sans handicap et elles sont plus frileuses vis-à-vis du handicap psychique que du handicap physique. Le milieu ordinaire n’est pas encore prêt, je constate que la société d’aujourd’hui est très dure. Néanmoins, la plupart du temps, cela fonctionne très bien. Nous avons un exemple d’un adulte de l’ESAT qui est dans une entreprise en mise à disposition depuis 4 ans. J’espère et je compte sur une prise de conscience globale et que l’on arrive à sensibiliser les gens pour favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap afin qu’ils puissent travailler ensemble et en harmonie. C’est grâce à la différence que l’on apprend le plus.»